C’est après la crise de 1928, en 1930 que Les frères Otto et Wilhem Maisch créent la "MAICO", contraction de MAIsch-COmpagnie, mais non sans risques : chômage, incertitude politique etc...
C'est donc avec prudence qu'ils se lancent
dans la construction de bicyclettes à Poltringen,
une petite bourgade du Jura Souabe.
Wilhem dirige l'atelier tandis que Otto gère l'administratif et le commercial
En 1933 le gouver nement allemand décrète la libération des taxes sur les 2 roues jusqu'à 200 cm3, qui va décider Maïco à fabriquer des motos dès 1934. Toute la partie cycle est fabriquée par Maïco alors que les moteurs 2 temps sont fournis par les constructeurs spécialisés ILO (98 cm3) et Fichtel Sachs (125 cm3). Dès lors, les 2 modèles sont présentés dans toutes les expositions du "Kaiserdam" de Berlin, avec beaucoup de clients en perspective, les affaires paraissent devoir marcher convenablement.
Wilhem Maisch (1980) |
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Malheureusement, cela ne dure pas longtemps, car
le dirigisme allemand met la main sur toute l'industrie à des fins militaires
et dicte la conduite de Maïco. L'industrie de guerre est florissante et les
locaux de Poltringen sont bientôt trop petits, il faut créer une seconde unité
de production dans le village voisin de Pfäffingen.
De par le manque de métaux, cette usine est construite en bois et les directives
de fabrication sont maintenant dictées par les services du Général Shelle :
assembler un petit véhicule à deux roues d’un modèle standard. Il va vite être
abandonné pour laisser la place à la fabrication de pièces d’armement
pour l'aviation. Pendant la période 1939 - 1945, les ateliers tournent
à plein rendement.
La
paix revenue, l'usine se retrouve alors sans commandes. La situation est catastrophique,
on ne peut se procurer des matières premières qu'avec des cartes de rationnement.
Il faut encore s’adapter : construction de jouets, de pièces détachées de bicyclette,
installation de gazogènes et aussi atelier de réparation du matériel
des troupes d’occupation françaises… tout est bon.
Otto Maisch revient de captivité et se met sérieusement à l’ouvrage pour se
procurer outils et matériaux. Dure tâche en vérité que tous ces passages de
frontières de zones, avec des contrôles très stricts, des randonnées aventureuses.
Mais tout persiste à aller mal, un jour les troupes françaises démontent l’usine
et réquisitionnent du matériel. Il leur faut alors encore improviser ! En zone
américaine, il y a davantage de facilité, au cours d’une "opération nocturne"
Maïco transporte le reste de son matériel en zone américaine, dans la petite
ville de Herrenberg et recommence à fabriquer des
bicyclettes.
La
réforme monétaire de 1948 est un tournant car elle
entraîne un phénomène que l’on a baptisé le "miracle
économique". Haute conjoncture, plein emploi, super production, la demande
en deux roues est extraordinaire. C'est pendant cette phase que Maïco construit
à Herrenberg sa nouvelle unité de production. Devant l’impossibilité de se procurer
des moteurs, l’ingénieur Tetzlaff
décide d’en construire un propre à Maïco. Ce sera un 125
cm3 2-temps avec 3 vitesses.
Le moteur de base fait des petits et d’autres
voient le jour adaptés aux exigences du moment :
La M-150 en 1950,
moto 2-temps avec commande de changement de vitesses au guidon.
La M-175 en 1952,
bien née, cette machine est en effet très performante avec 4 vitesses
au pied.
La M-200 S en 1953,
superbement suspendue et carénée, Maïco dispose désormais d’un excellent produit.
La M-250 "Blizzard " en 1954, va être le modèle de base des machines des futures générations. Avec bien des variations, c’est à partir de ce modèle que vont naître bien des motos chez Maïco : Tout terrain (Gelände Sport), moto cross, militaire, police, douanes, postes, moto ball... |
De
toutes les motos fabriquées par Maïco pendant cette période,
la "Taïfun" est la plus grosse cylindrée,
mais aussi la plus évoluée techniquement. Disponible dans les
cylindrées 350 et 400 cm3, les moteurs sont
des bi-cylindres 2 temps parallèles face à la route.
Au milieu des années 50, les fabricants de deux roues doivent aller se battre
sur le marché de la petite voiture, la passion de l’après guerre pour les motos
tendant à s'essouffler. A Pfäffingen, on choisit d'abord une solution
intermédiaire, construire un deux roues léger mais avec la même protection au
niveau des intempéries qu'une automobile. C’est ainsi que naissent la "Maïcoletta"
et sa grande sœur la "Maïco-Mobil", en traduction
l’auto sur deux roues ! Leur esthétique bien que très éloignée
des canons italiens du moment ne nuit pas à la réussite commerciale
de ces véhicules permettant de transporter 2 personnes avec leurs bagages.
Par la suite, continuant dans la diversification, Maïco présente
des petits véhicules à 4 roues, animés par un moteur bi-cylindres
Heinkel. Dont un tout petit cabriolet 2 places
à l'esthétique cette fois ci presque italienne. Ces voiturettes
n'ont pas le succès attendu, la tentative se solde par un échec
cuisant qui met à mal les finances de l'entreprise. La situation est
dramatique, pour éviter la faillite la direction est obligée de
réorganiser totalement la société. On abandonne la production
des scooters et des voiturettes en recentrant tout les efforts sur la "Blizzard",
le service compétition disparaît.
M250B Ce n'est finalement qu'avec cette providentielle commande de 10 000 motos tout-terrain à usage militaire passée en 1959 par l’armée allemande que Maïco sort du chaos. Dans un essai fait par les militaires, il est apparu que le prototype de chez Maïco est très largement supérieur aux modèles concurrents. Cette machine est construite sur une base de "Blizzard". Elle possède un châssis monotube très stable et un moteur 2-temps de 250 cm3. Elle est équipée de grosses sacoches en cuir et peinte en vert OTAN. Les douanes, la police, la poste aussi passent commande de machines similaires ormis bien sûr la couleur et autres petits détails. |
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Mais
c’est en 1954 que le virage a été pris avec la 175 transformée
en un modèle tout terrain. Elle est équipée d’un cadre simple berceau et, surtout,
d’un bras oscillant à l’arrière, ce qui, pour l’époque, est à la pointe
de la technique. A partir de ce modèle, l’usine s’intéresse au moto
cross et perfectionne son 175 cm3. Mais il faut attendre les années 1955
et 1956 pour que les Maico obtiennent leurs premiers succès. A la fin de 1956
commence la période d’évolution permanente, avec la préparation pour le Cross
de la 250 route dont le cadre est modifié pour la circonstance. En 1957,
Betzelbacher est Champion
d’Europe de motocross, le titre de vice-champion va à Willy
Oesterlé encore sur Maïco ! A cette époque, on décide aussi de
courir en 500 avec une 277 cm3 (250 réalésée). La 175 est toujours produite
et l’alliage léger fait son apparition pour remplacer la fonte utilisée pour
les cylindres.
Les preuves ont bien été faites et ce contrat de 10 000 motos en 1959 en est
la juste récompense. Les Maïco commencent à s'exporter dans tous
les pays d'Europe et d'Amérique, en Afrique une centaine au Soudan, et
aussi dans les missions...
A partir de 1960, la firme Maïco prend dorénavant
une large option dans le sport et ceci dans une grande diversité. C’est
ainsi que des milliers de moteurs de kart sont
exportés aux USA, des machines spéciales destinées au moto-ball
sont envoyées en Russie, en
G.P. de vitesse Maïco se forge un nom avec le modèle RS
125, et puis bien sûr le motocross, l’enduro…
En 1962, le Championnat du Monde remplace le Championnat
d’Europe. Les dirigeants de Maïco hésitent à prendre part au débat mondial qui
va fatalement occasionner des dépenses plus importantes. Finalement c'est oui
!
L’excellent Adolf Weil va être durant deux décennies, un modèle de pilotage et d’état d’esprit pour tous les autres pilotes. Dans sa carrière Ad' est vice-Champion du Monde et 14 fois champion d’Allemagne. Il recevra des mains du Président d’Allemagne Fédérale la "Feuille d’Argent". |
C’est
toujours en 1962 que les exportations s'organisent sérieusement, pour
consommer au milieu des années 70, plus de 80 % de la production.
En 1964, on met un sérieux coup sur les machines
de cross avec une partie cycle parfaitement adaptée à la discipline
sur les 250 et, surtout, un nouveau moteur de 360 cm3
est maintenant fabriqué. De ces deux motos seront extrapolés l’année
suivante deux modèles enduro. C’est depuis cette période que le succès des Maico
se fait de plus en plus marquant.
En 1967, un cyclomoteur à 5 vitesses ainsi qu'une
125 cm3 au bas moteur identique sortent des chaînes de montage pour un usage
routier.
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Jusqu'à cette époque, en France, la production Maïco est introduite de façon anarchique. Il n'y a pas de vrai importateur, encore moins de réseau commercial structuré. Les établissements Di Vozzo, Point, Loubet, Hardy, Michel Desbois, et d'autres... ont tous distribué dans l'hexagone des volumes de machines mal connus. Il faut attendre le 1er novembre 1968 pour qu'un vrai accord d'importation soit conclu par l'entremise de R.C. Delefosse alors journaliste à Moto Revue, entre l'usine MAÏCO et Hubert Soulignac. Un jeune coureur de 20 ans mais dont le père Marius, est une figure du moto cross établit en Arles dans les Bouches du Rhône. En 1968, ils n'importeront officiellement que 6 machines dont 2 pour Hubert. |
C'est que depuis longtemps, les pilotes qui souhaitent rouler Maïco on pris l'habitude de faire le déplacement jusqu'à l'usine pour y acheter leur matériel. Ils en profitent pour se tenir au courant des dernières modifications et entretiennent ainsi un relationnel direct avec les ingénieurs, leur faisant remonter les résultats de leurs expériences personnelles. |
En 1969, en vitesse la RS 125 cm3 est Championne d’Allemagne aux mains de Bernsee. En 1970, Pierre Viura est Champion de France avec une 125 RS préparée dans l'atelier de l'importateur Soulignac. L'expérience de Borje Jansson, à la troisième place du Championnat du Monde de vitesse 125 cm3 en 1971 et 1972, apporte du positif dans le domaine de l'évolution des machines de route de la marque. |
Dieter Braun |
MD 125 RS au musée de Suisheim |
Dans le domaine du motocross les années 1970
sont une période facile et d’embellie. Dès lors, les places d’honneur sont nombreuses
avec des pilotes comme Ake Jonsson, Ad'
Weil, Hans Maisch qui n'est autre qu'un
de fils de Wilhem, Fritz Kobele, Willy
Bauer. Peu à peu, ces machines performantes sont appréciées par bien
des pilotes hors de l’Allemagne, en Hollande, en Grande Bretagne ou encore en
Belgique les spécialistes du sable en sont friands, de Gerrit
Wolsink à Graham
Noyce, la liste est impressionnante.
De gauche à droite, messieurs Claude Bernardini (Champion
de France Police-Armées), Hubert Soulignac (importateur heureux),
Denis Portal (Champion de France 500 Inter), Gilles Portal (Champion de
France 250 National). Les autres Champions de France sur Maico cette année là sont Jean-Pierre Mougin (Sénior Cross) et Pierre Viura (125 Vitesse). |
Sans oublier chez nous avec les pilotes Queirel, Corroy, Mougin, Portal Denis et Gilles, Bernardini, Broutin, Bacou, Péan, Terroitin, Ollier, Gomez, Leblanc, Birbès. Même chose en enduro, où les titres remportés par Büse, Hass, Von Zitzewits et autres contribuent à faire apprécier Maïco. Le principal artisan de la réussite sportive n'est autre que l'ingénieur Gunther Schier. Depuis son arrivée à l'usine de Pfäffingen en 1966, la marque a réussi à s'octroyer en 1973 le titre de Champion du Monde des constructeurs en 500cm3. Mais paradoxalement aucun de ses pilotes n'a pu remporter un titre individuel. Et pourtant par 3 fois l'un deux s'est trouvé en seconde position pour le titre Mondial. On peut seulement regretter qu'à partir du milieu des années 70, le développement des machines de cross et d'enduro, se soit fait au détriment des machines de tourisme. Alors que les premières s'améliorent sans cesse, les autres donnent des signes évidents de vieillesse. Notamment les MD 50 et MD 125, la 250 reste une exception avec son moteur 2 temps monocylindre à distributeur rotatif dont la dernière évolution est la MD250WK Cup de 1980.
MD250WK Cup |
Extrait d'un article écrit par Alain Cordier en visite à l'usine de Pfäffingen, et paru dans "Motorama" numéro 29, fin 1973 : "Qui dit allemand dit discipline ! A Pfäffingen, c’est le cas de le dire. Chaque chose est à sa place et, apparemment, rien ne manque, rien n’est de trop. L’usine est, en gros, constituée de quatre bâtiments de même taille où sont réparties les différentes opérations nécessaires au montage d’une machine. Tout est fait sur place, sauf la fonderie confiée à la maison Mähle et la rectification des carters, cylindres et chemises qui s’effectuent à quelques kilomètres de là, dans des ateliers très modernes, à Herrenberg . Les moteurs. Nous avons vu d’où provenaient les pièces fondues, tout le reste, c’est à dire pignonerie (taillage, traitement), embiellage, etc... est usiné sur place. Le matériel utilisé est en bon nombre, et de très bonne facture. Une note pittoresque la main d’oeuvre est constituée de relativement peu d’indigènes ; on rencontre un tourneur grec par-ci, un fraiseur turc par-là et, même il m’est arrivé de saluer un balayeur italien ! . Mais pour hétéroclite qu' ’elle puisse être, la dite main d’oeuvre n’en est pas pour autant peu qualifiée, loin s’en faut ! Une fois les pièces toutes réunies, une partie s’en va vers l’immense classeur des pièces détachées, et l’autre vers la chaîne de montage des moteurs. Il n’y a pas de chaîne propre à chaque modèle. En réalité il n’y en a que deux, mais celles-ci sont agencées suivant un planning établi par la Direction en fonction des besoins. En plus clair, si l’on veut des 250 de tous terrains on approvisionne une chaîne de montage des pièces de 250 tout terrain et l’on fait de même pour la chaîne finale où sont amenés les moteurs finis et son montées les parties cycle. Les parties cycle sont montées suivant le même procédé. Une grande salle est installée en fonction de la fabrication des cadres dont les tubes sont préparés, coupés, cintrés puis assemblés. Ils sont ensuite conduits à la peinture, salle où sont aussi fabriqués les éléments en polyester qui équipent certains modèles. Les fourches sont aussi montées sur place, en série ininterrompue car un seul modèle équipe quatre types de motos. Les fourches des modèles de route (sauf la Marzocchi de la MD 250) sont aussi assemblées à l’usine, mais dans une autre salle. Les roues sont montées par un personnel féminin dont la précision et la rapidité de geste font plaisir à voir, croyez-moi ! Tous les accessoires d’équipement sont installés sur les motos lors de la dernière opération : le montage final sur une des deux chaînes prévues à cet effet. Au début de la chaîne un chariot transporte un cadre équipé des fourches avant et arrière. A la fin un "essayeur " prend le modèle terminé, l’amène hors du bâtiment et lui fait faire deux ou trois tours avant de le juger apte à prendre place parmi les machines prêtes à être livrées. Comme vous l’avez pu voir, tout est simple et bien organisé. Il n’y a que 250 personnes à l’usine, mais soyez certains que ce "petit monde " travaille vite et bien, dans une ambiance sereine qui n’a rien à voir avec l’idée que l’on se fait chez nous des travailleurs à la chaîne. N’oublions pas de parler du Saint des Saints, un atelier simple et bien conçu ; le service des recherches installé sous la salle de travail de Günter Schier et de son équipe. Heureux ingénieur que Monsieur Schier qui, de la table à dessin n’a que quelques marches à descendre pour aller "voir en bas " si tout va bien du côté du banc de puissance qui, m’a t-on affirmé ne s’arrête pas de tester des moteurs. On le croit sans peine après l’avoir vu : il y a des moteurs partout-partout ! "
Mr Maich (fils), l'importateur du Vénézuéla et un contremaître... |
Perçage des trous de goujons dans un cylindre |
Usinage d'un cylindre de MC250 (1981) |
Usinage d'un moyeu arrière (1981) |
Soies de vilebrequins |
Travail sur les bielles |
Une chaîne de montage des moteurs |
Polissage d'un couvercle de disque rotatif |
Moteurs prêts à être installés dans les parties cycles |
Marbre d'assemblage des cadres de motocross |
Contrôle des cadres avant peinture |
Ponçages des éléments en polyester |
MD50 en bout de chaîne |
MC250 en bout de chaîne |
"Qui dit allemand dit discipline ! A Pfäffingen, c’est le cas de la dire. Chaque chose est à sa place et, apparemment, rien ne manque, rien n’est de trop. L’usine est, en gros, constituée de quatre bâtiments de même taille où sont réparties les différentes opérations nécessaires au montage d’une machine. Tout est fait sur place, sauf la fonderie confiée à la maison Mähle et la rectification des carters, cylindres et chemises qui s’effectuent à quelques kilomètres de là, dans des ateliers très modernes, à Herrenberg . Les moteurs. Nous avons vu d’où provenaient les pièces fondues, tout le reste, c’est à dire pignonerie (taillage, traitement), embiellage, etc... est usiné sur place. Le matériel utilisé est en bon nombre, et de très bonne facture. Une note pittoresque la main d’oeuvre est constituée de relativement peu d’indigènes ; on rencontre un tourneur grec par-ci, un fraiseur turc par-là et, même il m’est arrivé de saluer un balayeur italien ! . Mais pour hétéroclite qu' ’elle puisse être, la dite main d’oeuvre n’en est pas pour autant peu qualifiée, loin s’en faut ! Une fois les pièces toutes réunies, une partie s’en va vers l’immense classeur des pièces détachées, et l’autre vers la chaîne de montage des moteurs. Il n’y a pas de chaîne propre à chaque modèle. En réalité il n’y en a que deux, mais celles-ci sont agencées suivant un planning établi par la Direction en fonction des besoins. En plus clair, si l’on veut des 250 de tous terrains on approvisionne une chaîne de montage des pièces de 250 tout terrain et l’on fait de même pour la chaîne finale où sont amenés les moteurs finis et son montées les parties cycle. Les parties cycle sont montées suivant le même procédé. Une grande salle est installée en fonction de la fabrication des cadres dont les tubes sont préparés, coupés, cintrés puis assemblés. Ils sont ensuite conduits à la peinture, salle où sont aussi fabriqués les éléments en polyester qui équipent certains modèles. Les fourches sont aussi montées sur place, en série ininterrompue car un seul modèle équipe quatre types de motos. Les fourches des modèles de route (sauf la Marzocchi de la MD 250) sont aussi assemblées à l’usine, mais dans une autre salle. Les roues sont montées par un personnel féminin dont la précision et la rapidité de geste font plaisir à voir, croyez-moi ! Tous les accessoires d’équipement sont installés sur les motos lors de la dernière opération : le montage final sur une des deux chaînes prévues à cet effet. Au début de la chaîne un chariot transporte un cadre équipé des fourches avant et arrière. A la fin un "essayeur " prend le modèle terminé, l’amène hors du bâtiment et lui fait faire deux ou trois tours avant de le juger apte à prendre place parmi les machines prêtes à être livrées. Comme vous l’avez pu voir, tout est simple et bien organisé. Il n’y a que 250 personnes à l’usine, mais soyez certains que ce "petit monde " travaille vite et bien, dans une ambiance sereine qui n’a rien à voir avec l’idée que l’on se fait chez nous des travailleurs à la chaîne. N’oublions pas de parler du Saint des Saints, un atelier simple et bien conçu ; le service des recherches installé sous la salle de travail de Günter Schier et de son équipe. Heureux ingénieur que Monsieur Schier qui, de la table à dessin n’a que quelques marches à descendre pour aller "voir en bas " si tout va bien du côté du banc de puissance qui, m’a t-on affirmé ne s’arrête pas de tester des moteurs. On le croit sans peine après l’avoir vu : il y a des moteurs partout-partout ! "
En 1981, Maïco est vraiment au top : 8500 machines sortent des chaînes de l'usine de Pfäffingen. "La qualité du produit ", voilà le soucis de la firme Maïco, qualité et aussi efficacité, ce qui fit écrire un journaliste américain dans Dirt-Bike : " sans vouloir porter trop de jugement, on peut à peine croire qu'’il y a une autre machine qui puisse rivaliser avec la MC 490… ". |
La marque est leader en Europe, à la pointe du progrès et possède des temps de réaction hyper courts car Maïco produit tout sur place. Les blocs, les cadres, les fourches, les boites, les moyeux, les radiateurs, les freins, tout est fait à Pfäffingen et Herrenberg. On sort alors jusqu'à 50 machines par jour ! |
En France les Maïco sont maintenant distribuées par Ferdinand Mangelsholts l'importateur belge qui vient d'installer un bureau à Cergy-Pontoise. Fin 80, Hubert Soulignac s'est vu retirer l'importation à la suite de divergences économiques et quelques mois plus tard Hubert disparaît tragiquement dans un accident de la circulation. En 1982 on salue l'arrivée des premiers monochocs sur les machines, l'Alpha Control dont Honda s'est s'inspiré pour son Prolink. |
Maïco en 1982 : c’est bien sûr les usines
allemandes de Pfäffingen et de Herrenberg, c’est aussi une société d’importation
située aux USA, dans la banlieue de Los Angeles et à Norfolk en Virginie. Si
les usines allemandes sont en difficulté, et bien c’est parce que, dit-on, les
filiales américaines sont, elles, en super bénéfice… C’est là que tout va commencer
à mal tourner. L'histoire voudrait
que la fille d'Otto Maisch, alors responsable de Maïco USA, soit partie
avec énormément d'argent. A Pfäffingen on ne peut rien pour
enrayer la faillite, c'est le drame. On saisit tout à Otto mais Wilhem,
bien qu'étant très malade reste. Ce sont ses trois fils Hans,
Peter et Wilhem Jr
qui tentent alors de remonter la marque. On
débauche 200 personnes et on fait une réembauche" neuve ", et chaque
fils sera responsable d’un secteur déterminé.
En 1983
à grand peine, ils produisent seulement une centaine d'exemplaires. La
première Maïco de 83 aurait été faite chez Hans, dans
son garage puisque entre temps tout a été vendu ! Et Maïco
repart. Mais les machines manquent de mise au point, ce sont les boites à
vitesses qui cassent trop souvent. En France, la disparition de M. Mangelsholt
en mai perturbe la distribution et laisse les clients désemparés.
Sauf en région toulousaine ou sévit depuis 5 ans le plus gros
revendeur de Maïco de l'hexagone : Jean Birbès.
Et Jean fait tout pour que les pilotes ne restent pas sur le bord de la piste.
Il y passe toutes ses journées et une grande partie de ses nuits. Du
fond de son atelier, il tient la marque à bout de bras. Ce qui ne l'empêche
pas d'être sur les terrains tous les dimanches pour rouler un peu et y
faire l'assistance. C'est donc tout naturellement à lui que début
septembre, Peter Maisch propose l'importation Maïco.
Qu'il a conservée contre vents et marées jusqu'à aujourd'hui.
Moyens en 1984, les chiffres de vente
repartent en 1985 avec plus de 500
motos. Pendant quelque temps, les machines ne s'appellent plus Maïco
mais M.Star. Les frères Maisch, qui ont
d'abord racheté le matériel de production sont en litige avec
"l'administrateur de biens". C'est le syndic qui lui, cherche à récupérer
de l'argent pour rembourser les créanciers de l'ancienne affaire. On
les comprend un peu lorsqu'on se rappelle que Maïco signifie "Maisch
Compagny",
c'est un peu leur demander de racheter leur propre nom !
Et en 1986 on retrouve les beaux jours. Les frères
Maisch embauchent Bert Von Zitzewitz, Rolf
Diffenbach, Leif Nicklasson et Colin
Dugmore. Ce dernier roulera en Grand Prix aux côtés de
Mark Velkeneers. En France Jean-Marie Bennerotte est Champion de france
en enduro catégorie Nationale. Pendant cette année, ils produisent
1500 machines mais malheureusement c'est trop.
Seules 1100 sont vendues et les 400 restantes sont alors redémontées
et bradées mais ça ne suffit pas à combler le trou dans
les caisses. Les ouvriers ne sont plus payés, les fournisseurs non plus,
fin 86 Maïco replonge dans le gouffre d'une
nouvelle faillite. Terrible ! D'autant plus terrible qu'entre temps en France,
Jean Birbès a enregistré 250 commandes pendant le salon. Au début
du salon Maïco va bien, à la fin de la quinzaine, on vient le prévenir
que tout est fini. L'enfer recommence !
Jean Birbès (1993) |
En 1987, les frères Maisch sont là mais ne peuvent plus produire aucune moto. Jean Birbès va lui-même en Allemagne depuis Toulouse toutes les semaines voir Peter Maisch, Hans est totalement démoralisé, et Wilhem est interné dans un établissement psychiatrique. C'est l'époque la plus noire, Maïco est à vendre, quelques repreneurs sont intéressés dont les Suédois de l'ex-Husqvarna par l'intermédiaire de M. Nordberg, importateur Maïco dans son pays. Finalement, fin 87 les frères Maisch revendent Maïco à Lorentz Merkle un industriel Bavarois qui, dans un élan patriotique à voulu que Maïco reste allemand. C'est son père qui avance 1 million de DM pour le nom (à l'époque 3,3 millions de nos francs) et autant pour les machines outils car il veut continuer à fabriquer le maximum de pièces à l'usine. Une partie des bâtiments est vendue un 3éme million de DM à une usine de textiles de Tübingen. Cette entreprise ne pourra jamais utiliser s es locaux car le site est gravement pollué (citernes pourries enterrées, résidus de traitement du métal, peintures...) Un procès retentissant suivra dont on ne connaît pas l'issue.
En 1988, Peter Maisch lance Wulfsport, une marque de fringues tout terrain. Malheureusement il n'a pas assez d'argent et fait produire par Bill Brown, l'importateur Maïco british. Très vite, Wulfsport devient 100% anglais.
Pendant ce temps Lorentz Merkle va mettre près d'un an à transporter Maïco de Pfäffingen à Nordlingen en Bavière et ce n'est qu'à partir de 1989 qu'il commence à travailler normalement. Il s'associe avec Zabel, (le génie du Side car cross) il met à profit ses excellentes qualités de technicien et sort une nouvelle génération de moteurs, longue course sur la 500, haut moteur avec culasse plate sur la 250. L'association ne dure que 6 mois car M. Zabel oublie un peu de payer ses factures et Merkle est à nouveau seul... |
En 90, il essaie de mettre ses motos au goût du jour (pot low boy) et propose des cylindrées intermédiaires (320 et 380). Plus de 200 machines sortent alors de Nordlingen dont 70 pour la France. Zabel parti, Merkle ne le remplace qu'en 91 par Robin, un technicien anglais envoyé par le dynamique Bill Brown toujours importateur Maïco pour la Grande Bretagne et 300 motos sont construites. |
Malheureusement dès 92, les petits problèmes resurgissent. Merkle veut un cadre nouveau avec l'arrière démontable, des nouveaux carters moteurs ainsi un bloc 440. La production est dramatiquement en retard et les clients ne peuvent disposer de leurs matériel qu'en avril. |
En 93 c'est mieux, les Maïco sont bonnes et à l'heure. La 440 est développée, l'usine se structure et se modernise avec un système de livraison automatisée des pièces détachées.
En 1994, Lorentz Merkle espère enfin atteindre le seuil d'équilibre soit environ 500 motos. Une centaine de machines sont livrées en France, un peu plus en Grande Bretagne, quelques-unes en Belgique, en Australie, en Russie, aux USA. Deux nouveaux techniciens ont été embauchés (des ex-EML) dont un très bon motoriste. On voit arriver un cadre redessiné et un projet de 125 (hélas jamais concrétisé).
D'autres projets ont plus ou moins avancés dont des 4 temps : un avec une mécanique Rotax à air et un autre par un XR600. Des prototypes roulent déjà depuis un ou deux ans, mais restent sans suite commerciale. |
Enfin, des side car de cross motorisés par un bicylindre maison de 640 cm3 (2 cylindres de 320 cm3). Mises en fabrication ces machines sortent au compte goûte car elles sont assemblées artisanalement, leur production n'excède pas une dizaine d'unités.
Début 1995 M. Merkle Père
n'a plus trop d'argent, dans l'affaire il en a beaucoup injecté et pas
trop récupéré. Une lassitude certaine, l'âge, des
problèmes de santé et des litiges avec son fils, font qu'il envisage
sérieusement de vendre Maïco. Il engage un audit : "Baus Consulting"
de Bonndorf qui fait une sérieuse étude de marché et cherche
à vendre l'usine Maïco.
La première proposition émane d'un groupe malaysien ! Mais elle
ne se concrétise pas.
C'est finalement une association entre Remco Demmer (qui fait dans l'usinage
de métaux aux Pays Bas), Luca Portelli (fils de l'ancien très
bon importateur italien dans les années 70-80) et Lorentz Merkle qui
reprend l'usine à son compte. L'usine est déménagée
en Hollande dans les locaux de M. Demmer Père, dans la localité
de De Bilt non loin de Utrecht.
L'association ne dure que quelques mois
(de fin 1995 à mars 1996), au terme desquels c'est la famille Demmer
qui reprend tout à son compte.
Fin 96, coup de théâtre : le groupe hollandais "Jacobs Trade" se
dit propriétaire de Maïco ! Mis au courant, Jean Birbès va
les rencontrer chez eux à Venlo (Maastrich). Il découvre alors
que Jacobs est un groupe qui fait travailler plein de monde dans différents
secteurs comme le vélo, les machines outils etc. En fait Jacobs se charge
de la commercialisation des motos Maïco qui restent, elles, usinées
et assemblées par messieurs Demmer père et fils.
Début 1997 : L'association avec
Jacobs Trade est arrêtée et c'est Remco Demmer qui reprend à
nouveau la distribution des motos à son compte.
Juin 1997 : Il semble que la famille Demmer n'ait pas payé la famille
Merkle ! M. Merkle père envisage alors de vendre Maïco aux Indonésiens.
Lorentz va d'ailleurs sur place travailler à l'emménagement de
la nouvelle usine. Le 31 juillet, M. Demmer père rachète Maïco
(ou finit de la payer) et tout reste en Hollande.
L'inauguration de la nouvelle usine est prévue pour le 1er septembre à 1997 à Bunnik toujours à côté de Utrecht. |
24 juin 1998 : La société Maïco Motorcycles N.V. est déclarée en "banqueroute". L'arrêt définitif de la production est prononcé pour le 31 décembre de la même année.
1er janvier 1999 : La société BRM Sport de Nijkerk, représentée par M. Brouwer rachète Maïco et continue la production à très petite échelle. Moins de 20 unités (rien que des 500 cm3) sont importées en France...
2000 et 2001 : La production est quasiment arrêtée. En décembre 2000, Jean Birbès se rend en Hollande pour s'entendre dire : "On est en stand-by mais ce n'est pas fini, on va redémarrer !"
2002 : Un motocyste allemand, Axel Köstler de Leverkusen assemble des machines avec les pièces qu'il a rachetées à M. Brouwer. Il propose une gamme complète cross, enduro et supermotard.
Bibliographie :
- "En passant par Pfäffingen" d'Alain Cordier,
journal "Motorama" n° 29 de fin 1973.
- "50 jahre MAICO - 1931 -1981" plaquette éditée
par l'usine en 1981.
- "Maïco 50 ans d'histoire" de Livio de Nadaï,
journal "Moto Tout-terrain" n° 64 de mars 1984.
- "Maïco, la passion dévorante" d'Alain
Lecorre, journal "Moto verte" n° 239 de mars 1994.
Remerciements :
- A Livio de Nadaï pour les documents, les souvenirs...
- A Jean Birbès dont la passion est restée intacte.
- Et à Claude Bernardini
ancien chef d'atelier chez Soulignac.